MARTYRE DE QUATRE CHRÉTIENS IROQUOIS, A ONNONTAGUÉ, AU MOIS DE SEPTEMBRE 1690 ET PENDANT LES ANNÉES SUIVANTES.

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gabrielle
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Re: MARTYRE DE QUATRE CHRÉTIENS IROQUOIS, A ONNONTAGUÉ, AU MOIS DE SEPTEMBRE 1690 ET PENDANT LES ANNÉES SUIVANTES.

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Il était naturel qu'on accordât la vie à son fils ; mais un Iroquois à qui il avait été donné, voulut se venger sur lui de l'affront qu'il croyait avoir reçu des Français. On fut surpris, trois jours après la mort de Marguerite, d'entendre au commencement de la nuit un cri de mort. A ce cri, tous les sauvages sortirent de leurs cabanes pour se rendre au lieu d'où il partait. L'habitante de Montréal dont j'ai parlé, y courut avec les autres. Là se trouva un feu allumé, et l'enfant prêt à y être jeté. Les sauvages ne purent s'empêcher d'être attendris à ce spectacle ; mais ils le furent bien davantage lorsque cet enfant, qui n'avait qu'un an, levant ses petites mains vers le ciel avec un doux sourire, appela par trois fois sa mère, témoignant par son geste qu'il voulait l'embrasser. L'habitante de Montréal ne douta point que sa mère ne lui eût apparu : il est du moins probable qu'elle avait demandé à Dieu que son fils lui fût réuni au plus tôt afin de le préserver d'une éducation licencieuse qui l'aurait tout à fait éloigné du christianisme. Quoi qu'il en soit, l'enfant ne fut pas abandonné aux flammes ; un des plus considérables du pays l'en délivra, mais ce fut pour le faire mourir d'une mort qui n'était guère moins cruelle : il le prit par les pieds, et l'élevant en l'air, il lui fracassa la tête contre une pierre.

Je ne puis m'empêcher, mon Révérend Père, de vous parler encore d'un quatrième néophyte de cette mission, lequel, bien qu'il ait échappé au feu qui lui était préparé, a eu pourtant le bonheur de donner sa vie pour ne pas s'exposer au danger de perdre sa foi. C'était un jeune Agnié, nommé Haonhouentsioutaouet. Il fut pris par un parti d'Agniés qui le menèrent esclave dans leur pays. Comme il avait beaucoup de parents, on lui accorda la vie et on le donna à ceux de sa cabane. Ceux-ci le sollicitèrent fortement de vivre, selon les coutumes de sa nation, c'est-à-dire de se livrer à tous les désordres d'une vie licencieuse. Etienne, loin de les écouter, leur opposait les vérités du salut, qu'il leur expliquait avec beaucoup de force et d'onction, et il les exhortait sans cesse à venir avec lui à la mission du Sault pour y embrasser le christianisme. Il parlait à des gens nés et élevés dans le vice, dont ils s'étaient fait une trop douce habitude pour se résoudre à le quitter. Ainsi les exemples et les exhortations du néophyte ne servirent qu'à les rendre plus coupables devant Dieu.
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gabrielle
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Comme il s'aperçut que son séjour à Agnié n'était d'aucune utilité pour ses parents, et qu'il devenait même dangereux pour son salut, il prit la résolution de retourner au Sault ; il s'en ouvrit à ses proches, lesquels y consentirent d'autant plus volontiers, qu'ils se voyaient délivrés par là d'un censeur importun, qui reprenait continuellement les vices de sa nation. Il quitta donc une seconde fois son pays et sa famille pour conserver sa foi qui lui était plus chère que tout le reste.

A peine était-il en chemin, que le bruit de son départ se répandit dans toutes les cabanes. On en parla surtout dans une, où de jeunes ivrognes faisaient actuellement la débauche : ils s'échauffèrent contre Etienne, et après bien des invectives, ils conclurent qu'il ne fallait pas souffrir qu'on préférât ainsi le village des chrétiens à leur pays, que c'était un affront qui rejaillissait sur toute la nation, qu'ils devaient contraindre ce chien de chrétien de revenir au village, ou lui casser la tête, afin d'intimider ceux qui seraient tentés de suivre son exemple.

Aussitôt trois d'entre eux s'armèrent de leurs haches, et coururent après Etienne ils l'eurent bientôt atteint, et, l'abordant la hache levée : « Retourne sur tes pas, lui dirent-ils brusquement, et suis-nous ; tu es mort si tu résistes, nous avons ordre des anciens de te casser la tête. » Etienne leur répondit, avec sa douceur ordinaire, qu'ils étaient maîtres de sa vie, mais qu'il aimait mieux la perdre que de risquer sa foi et son salut dans leur village ; qu'il allait à la mission du Sault, et que c'était là qu'il était résolu de vivre et de mourir.
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gabrielle
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Comme il vit qu'après cette déclaration si précise de ses sentiments, ces brutaux se mettaient en devoir de le tuer, il les pria de lui accorder quelques instants pour prier Dieu ; ils eurent cette condescendance, tout ivres qu'ils étaient, et Etienne s'étant mis à genoux, fit tranquillement sa prière, où il remercia Dieu de la grâce qu'il lui faisait de mourir chrétien. Il pria pour ses parents infidèles et, en particulier, pour ses bourreaux qui, dans le moment, levèrent leurs haches et lui fendirent la tête.

Nous apprîmes une mort si généreuse et si chrétienne par quelques Agniés qui vinrent dans la suite fixer leur demeure à la mission du Sault.

Je serais infini, mon Révérend Père, si je vous parlais encore de plusieurs néophytes dont la vertu et la foi ont été pareillement éprouvées : ce que j'ai l'honneur de vous écrire suffit pour vous donner une idée de la ferveur qui règne dans la mission de Saint- François -Xavier-du-Sault. Monseigneur l'évêque de Québec, qui a visité nos néophytes. a rendu un témoignage public à leur vertu; c'est ainsi qu'en parle ce grand prélat dans une relation qu'il fit de l'état de la Nouvelle-France, et qu'il rendit publique en 1688: « La vie commune de tous les chrétiens de cette mission n'a rien de commun, et l'on prendrait leur village pour un véritable monastère. Comme ils n'ont quitté les commodités de leur pays que pour assurer leur salut auprès des Français, on les voit tous portés à la pratique du plus parfait détachement, et ils gardent parmi eux un si bel ordre pour leur sanctification qu'il serait difficile d'y ajouter quelque chose.

J'espère, mon Révérend Père, que votre zèle vous portera à prier souvent le Dieu des miséricordes pour ces nouveaux fidèles afin qu'il les conserve dans cet état de ferveur où il les a mis par sa grâce.

Je suis avec bien du respect, etc.



CROLENEC, S. J.
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