Résumé de théologie dogmatique, Livre V : La Rédemption

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En plus de ces témoignages directs, il y a de nombreux passages dans lesquels le sang du Christ (versé à sa mort) est dit avoir tous les effets du sang versé dans les anciens sacrifices. Le sang du Christ est notre rançon, λύτρον, ἁντίλυτρον (Eph. 1:7 ; Col. 1:14 ; 1 Pierre 1:19 ; Apoc. 5:9) ; notre réconciliation avec le Père (Col. 1:20 ; cf. Eph. 2: 13-15 ) ; notre justification (Rom. 5:9) ; la rémission de nos péchés (Matth. 26:28) ; la purification du péché (1 Jean 1:7 ; Apoc. 1:5 ; 7:14 ; 22:14) ; le sang de la nouvelle alliance avec Dieu (1 Cor. 11:25 ; 1 Pierre 1:2). De même, la mort du Christ est dite effectuer notre réconciliation (Rom. 5:10), le rachat de nos iniquités (Héb. 9:15).

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La doctrine si clairement énoncée dans les passages que nous venons d'énumérer, ne laisse pas place au doute concernant le sens en lequel le Christ avoir versé son sang (ou été mort), "pour la multitude", "pour tous", "pour les pécheurs", "pour nous" (Matth. 26:28; 20:28; 1 Tim. 2:6 ; Rom. 5:6 ; 2 Cor. 5:14 et suiv. ; 1 Thess. 5:10). Dans la plupart de ces passages, le mot ὑπὲρ(pour) est utilisé au lieu d' ἄντὶ (à la place de), et ce mot peut dans l'absolu être littéralement interprété comme voulant dire "en notre nom", ce qui semblerait atténuer l'aspect substitutif du sacrifice du Christ. Cependant, ἄντὶ est utilisé en Matth. 20:28 (δοῦναι τὴν ψυχὴν αὑτοῦ λύτρον ἁντὶ πολλῶν), et 1 Tim. 2:14 (ἀντὶλυτρον), ce qui, combiné à la doctrine que nous venons d'exposer, montre bien que ὑπὲρ peut avoir le sens d'ἀντὶ (cf. le dictionnaire de Liddell et Scott, sub voce). Il est d'ailleurs malaisé de comprendre comment le Christ est mort "en notre nom" s'il n'est pas en même temps mort "à notre place".

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L'idée de sacrifice de substitution apparaît tout aussi clairement quand le Baptiste appelle le Christ l'agneau qui porte et enlève les péchés du monde (référence à Isaïe 53), ou encore en 2 Cor. 5:21 : "Le Christ qui ne connaissait point le péché, il l'a fait péché (ἁμαρτίαν) pour (l’amour de) nous", ce qui veut dire qu'il a été traité comme s'il portait nos péchés ; et en Gal. 3:13 : "Le Christ est devenu malédiction (κατάρα) pour nous", ce qui veut dire qu'il a reçu à notre place les effets de la colère divine que nous méritions. Le mot de Rédemption lui-même connote une idée de sacrifice (Lev. 27:27-33 ; Num. 18:15-17).

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Le prophète Isaïe montre nettement l'aspect substitutif du sacrifice du Christ :

4 Vraiment, il a porté nos langueurs, et il s’est chargé lui-même de nos douleurs ; et nous l’avons considéré comme un lépreux, comme un homme frappé de Dieu et humilié. 5 Et cependant il a été (lui-même) blessé pour (à cause de) nos iniquités, il a été brisé pour (à cause de) nos crimes ; le châtiment qui nous procure la paix est tombé sur lui, et nous avons été guéris par ses meurtrissures. 6 (...) le Seigneur a placé sur lui l’iniquité de nous tous 7 Il a été offert parce que lui-même l’a voulu, (...) 10 Mais le Seigneur a voulu le briser par la souffrance (dans son infirmité) s’il livre sa vie pour le péché ("comme offrande pour le péché" dans l'original hébreu) (...) 12 il a porté les péchés de beaucoup d’hommes et qu’il a prié pour les pécheurs

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VI. Les objections à la possiblité et à la convenance de la réparation par procuration du Christ concernent les trois acteurs de cette réparation : Dieu, le Christ et l'homme.

VI. 1. Les rationalistes s'opposent à l'idée d'un Dieu qui s'offense d'actes d'êtres qui sont infiniment moins que Lui ; à l'idée d'un Dieu qui se met en colère et reste en colère jusqu'à ce que réparation soit faite. Cette objection prétend donc voir là un atteinte à l'immutabilité de Dieu, ainsi qu'une certaine mesquinerie qui lui serait attribuée. Nous avons suffisamment répondu à la première partie de cette objection à la section 65.

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En ce qui concerne le deuxième, il n'est pas indigne de Dieu de règler jusqu'aux plus petites actions de ses créatures suivant sa sainteté, sa justice et sa miséricorde. L'idée de mesquinerie revancharde est complètement exclue par la miséricorde infinie dont Dieu fait preuve envers le pécheur en lui facilitant le salut. La réparation même qu'il demande qu'on lui rende, il la donne gratuitement par ailleurs, et que les pécheurs sont "justifiés gratuitement par sa grâce, par la rédemption qui est en Jésus-Christ." (Rom. 3:24).

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VI. 2. Une autre objection dit : "la réparation doit être faite par le coupable, et non par un tiers ; la réparation par procuration implique que le juste est puni au lieu de l'injuste." Réponse à cette objection : dans l'économie du salut, le pécheur est obligé de faire personnellement réparation, sinon il est damné. Les souffrances du Christ ne sont point une "punition" comme pour le pécheur, et ne sont point opposées à sa volonté comme dans le cas du pécheur : mais par le plus saint des actes libres, il a subi les peines du péché pour mériter pour le pécheur un moyen de réparation qui était hors d'atteinte des capacités humaines. Sa réparation par procuration n'est pas un transfert de la punition de l'injuste au juste, mais un transfert des mérites du juste à l'injuste.

Sur toute cette section, on pourra consulter S. Thomas, IIIa, qq. 48 et 49.

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Section 206. Perfection de la réparation faite par le Christ.

I. S. Paul enseigne la "surabondance" de la réparation faite par le Christ :

Mais il n’en est pas du don comme du péché : car si, par le péché d’un seul, beaucoup sont morts, à plus forte raison la grâce et le don de Dieu se sont-ils répandus abondamment (ἑπερίσσευσεν) sur un grand nombre par la grâce d’un seul homme, Jésus-Christ. (...) là où la faute a abondé, la grâce a surabondé

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Les mérites du Christ, par leur infinité, rendent à Dieu un honneur qui est beaucoup plus que suffisant pour réparer l'outrage causé par le péché. L'offense liée au péché n'est infinie que par l'infinité de son objet externe, Dieu ; tandis que les actions du Christ sont au contraire infinies par leur principe interne, le Christ lui-même. Leur infinité est donc d'un ordre qui est plus élevé que celui du péché. De même, les actes sacrificiels de l'homme-Dieu offrent à Dieu un hommage infini qu'il accepte ; tandis que l'injure du péché n'affecte pas Dieu intrinsèquement. Enfin, la Rédemption a été accomplie par toute une série d'actes méritoires, dont un seul d'entre eux suffisait à racheter l'humanité entière.

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II. L'idée même de la rédemption de l'humanité par le Christ présuppose que Dieu était d'accord sur le principe d'accepter l'œuvre du Rédempteur comme rançon pour les péchés de l'humanité. Comme cette œuvre a été dûment accomplie, avec une perfection surabondante, Dieu était tenu par sa promesse et sa justice d'accorder la rémission des péchés autant que le Christ le demanderait et comme le Christ le demanderait.

L'éminente admissibilité de la réparation apparaît encore quand on considère la perfection de la médiation du Christ. Il représente mieux l'humanité qu'Adam, parce qu'alors qu'Adam est père de l'humanité selon la chair seulement, le Christ en est la Tête selon l'esprit, instituant une solidarité générale entre les membres par un acte de sa volonté toute-puissance. Par ailleurs, étant Dieu, il ne pouvait qu'accepter l'œuvre qu'il avait accomplie lui-même.