Résumé de théologie dogmatique, Livre V : La Rédemption

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II. 1. L'objet du sacrifice est le même que celui de la religion pratique en général : celui de reconnaître Dieu comme principe et fin ultimes de l'homme et de toutes choses ; c'est-à-dire de professer par des actes notre dépendance totale de Lui, que ce soit pour notre existence ou notre félicité ultime. Certains théologiens post-tridentins ont restreint l'idée de sacrifice au règne de Dieu sur la vie et la mort, ou bien le pouvoir divin de disposer de toutes choses, ou encore l'exaltation suprême de la majesté divine ; et limitent l'objet principal du sacrifice à la réparation des péchés.

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II. 2. La forme extérieure du sacrifice a, elle aussi, fait l'objet d'un amoindrissement de portée par Vasquez et d'autres à sa suite, comme impliquant nécessairement la "transformation par destruction". Ni l'histoire ni la théologie ne justifient un tel parti pris ; ainsi, le brulement de l'encens (θυσία), qui dans la langue grecque a donné un mot qui désigne tous les sacrifices, est moins la destruction de l'encens que sa conversion en une "odeur de sainteté", symbole de l'âme humaine transformée par le feu de la charité. On pourrait dire des choses semblables de tous les autres sacrifices, sans exception. Dans le sacrifice de la Messe, l'immutatio, pour utiliser le terme technique utilisé par les Pères pour désigner l'acte sacrificiel, n'est pas la destruction, mais la production de la victime.

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II. 3. Un ministre légitimement ordonné est nécessaire pour offrir un sacrifice public au nom du peuple. Si on veut que le sacrifice soit plus que l'acte d'adoration extérieure le plus expressif, si on veut qu'il ait une dignité et une efficacité particulières, le ministre doit être consacré : la valeur d'un sacrifice se mesure à l'aune de la dignité personnelle de celui qui offre. Ainsi, la validité les sacrifices symboliques de la loi mosaïque découlait de la sanctification et de la prêtrise laïque de tout le peuple ; dans la loi chrétienne, la validité surnaturelle du sacrifice intérieur ou public découle de la sainteté et dignité surnaturelles du laïque ou du clerc. Cf. S. Thomas, Ia IIae, q. 102 et IIa IIae q. 85.

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Section 210. Le sacerdoce du Christ et ses fonctions.

Le sacerdoce du Christ et ses fonctions sont expliquées dans l'Épître aux Hébreux, pour que ces Hébreux nouvellement convertis abandonnent l'ancien et défectueux sacerdoce d'Aaron et se rattachent au Christ, le Grand Pontife qui est entré au ciel. Cette épître n'épuise cependant pas le sujet et n'avait pas à le faire, puisqu'elle se proposait uniquement de démontrer la supériorité du sacerdoce du Christ sur celui d'Aaron. Les théologiens protestants ont donc tort d'invoquer ce texte pour restreindre les attributs du sacerdoce du Christ comme ils le font.

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I. Le sacerdoce du Christ est éminemment hiérarchique et parfait sous tous ses aspects. Le Christ "s'approche" de Dieu au nom de l'humanité, et son sacrifice a suffisamment de force pour ôter les péchés du monde. Il n'existe pas de sacerdoce supérieur au sien ; tous les autres sacerdoces de l'ancien ou du nouveau Testament dépendent de lui pour leur existence et efficacité. Il est éminemment parfait, par ce que (a) il possède toutes les perfections des autres sacerdoces, sans aucuns de leurs défauts ; (b) il possède le pouvoir de faire de la manière la plus parfaite et hiérarchiquement organisée tout ce qu'un sacerdoce peut faire.

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I. 1. Un prêtre est quelqu'un qui est "mis à part" pour Dieu et investi de l'honneur et des pouvoirs de son ministère par un acte de consécration. Quand un homme ordinaire est élevé à la prêtrise, il est fait ministre de Dieu par une onction accidentelle ; tandis que le Christ est constitué Fils de Dieu par une onction substantielle de la nature divine. Il possède donc la dignité et les pouvoirs sacerdotaux par sa nature même. De là sa sainteté pré-éminente. Un prêtre ordinaire n'est pas rendu impeccable par sa consécration ; pour sa sanctification personnelle, il a besoin du ministère d'autres prêtres ; sa sainteté personnelle n'est pas la source de la sainteté qu'il distribue à d'autres.

La consécration du Christ, c'est-à-dire l'union hypostatique, le fait saint, innocent, sans tache, séparé des pécheurs (Héb. 7:26-28), et le constitue détenteur et distributeur de la sainteté de Dieu même. Le prêtre ordinaire "s'approche de Dieu" d'une manière très-imparfaite, tandis que le Christ est assis à la droite du trône de la Majesté divine (Héb. 8:1). Comme les autres prêtres, le Christ a connu les faiblesses et les souffrances de notre nature (Héb. 5:2), sans pourtant y perdre sa dignité et sa sainteté : bien au contraire, sa mort n'était que la voie qui l'a conduit à l'exercice perpétuel de son sacerdoce dans la vie éternelle (Héb. 7:25).

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I. 2. Comme les pouvoirs sacerdotaux du Christ viennent de sa consécration hypostatique, ils sont éminemment parfaits eux aussi. Étant consacré pleinement par la divinité elle-même, il peut à son tour et consacrer ce qu'il veut, et le rapprocher de Dieu ; il peut dispenser toutes les choses saintes, que ce soient des offrandes de l'homme à Dieu, ou des dons gratuits de Dieu à l'homme. Il a le pouvoir d'accomplir le plus parfait des sacrifices qui établit et scelle l'alliance entre Dieu et l'homme ; la victime du sacrifice est à la fois le gage de l'alliance, le détenteur et le distributeur du pouvoir sanctifiant du Saint-Esprit (cf. Héb. 9:14 et suiv., et 10:14).

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On comprend alors facilement combien ce sacerdoce divin est excellent et supérieur au sacerdoce imparfait, inefficace et transitoire d'Aaron (tout cela est détaillé dans l'Épître aux Hébreux, comme mentionné précédemment). Pour résumer en quelques mots : le sacerdoce lévitique était temporel, terrestre et charnel dans son origine, sa relation à Dieu, son fonctionnement et ses pouvoirs ; tandis que le sacerdoce du Christ, sous tous ces rapports, est éternel, céleste et spirituel.

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II. 1. Les choses offertes à Dieu par les sacerdoces de l'ancienne loi étaient ou bien inanimées, ou au mieux des créatures non douées de raison, distinctes de la personne de l'offrant. Dans le sacerdoce du Christ en revanche, l'offrande fait partie de la personne du sacrificateur : c'est sa chair vivante et humaine, animée par son âme rationnelle ; il s'agit donc d'un sacrifice spirituel et rationnel (πνευματικόν, λογικόν) comme dit l'Écriture. Ainsi la victime sacrificielle offerte par le Christ est un substitut de l'humanité (au nom de laquelle le sacrifice est fait) qui n'est pas seulement symbolique, mais vraiment réel et équivalent. C'est une victime "immaculée, sans tache", tandis que ses prédécesseurs étaient au mieux des animaux sans défauts physiques.

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Enfin, les offrandes apportées à l'autel dans l'ancienne loi étaient consacrées par leur contact avec des personnes, autels ou feux consacrés. L'offrande du Christ est sainte par elle-même, avant l'acte d'offrande, c'est -à-dire son onction avec la substance divine. Cette même onction, en laquelle le Verbe oint son humanité du sacerdoce le plus élevé, en même temps fait d'elle l'autel du sacrifice et le feu spirituel qui éclaire et vivifie la victime. Ainsi, à l'instant même où l'union hypostatique a eu lieu, le Pontife, l'autel, la victime et le feu du nouveau sacrifice ont été consacrés, et le Verbe a dès lors commencé à offrir une "oblation spirituelle et rationnelle" (προσφορά πνευματικὴ καὶ λογική).