Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1988)

Avatar de l’utilisateur
Abbé Zins
Messages : 4602
Inscription : sam. 07 oct. 2006 2:00

Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

Message par Abbé Zins »

Georges SALET
en vacances

le 7 Août 1987

à

Monsieur l'Abbé ZINS
TOURS


Monsieur l'Abbé,

Je reçois à l’instant votre lettre du 5 et vous en remercie. Je réponds pour l’instant uniquement à votre P.S.

Si
, je fais campagne contre les sacres envisagés par Mgr Lefebvre, et venant de recevoir divers documents fort intéressants, je viens de décider que le prochain n° de Septembre serait tout entier, ou presque, consacré à cette question.

Je reporte donc à octobre ce qui était déjà prêt pour ce n° de Septembre, ce qui m’oblige, pour septembre, à écrire à nouveau pour la 3e fois consécutive un n° presque entièrement de ma plume.

Bien que j’aie une foule de choses à vous écrire à propos de votre dernière lettre et de celle de 17 pages qui précédait, je suis obligé de m’occuper d’abord de cette question du sacre et vous écrirai longuement dès que ce n° de Sept. sera bouclé.

Veuillez donc m’excuser et agréer l’expression de mes respectueux sentiments.
Avatar de l’utilisateur
Abbé Zins
Messages : 4602
Inscription : sam. 07 oct. 2006 2:00

Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

Message par Abbé Zins »

Georges SALET
à Versailles

6 Septembre 1987

à

Monsieur l'Abbé ZINS
TOURS

Monsieur l'Abbé,

Je vous demande d’abord des prières pour mon ami et collaborateur H. Le Caron qui écrit avec moi dans “de Rome..” et qui est très gravement malade.

Je viens de boucler le n° 81 qui aura 26 pages consacrées uniquement aux sacres envisagés par Mgr Lefebvre et qui, je pense, vous intéressera.

C’est le 4e numéro depuis mars que je rédige pratiquement entièrement.

Nous partons à Chatel-Guyon mardi où j’emporte mon mini ordinateur et mon premier travail sera de répondre à votre aimable lettre du 5 Août.

Oui, je reconnais que notre dialogue n’a pas été un dialogue de sourds au sens propre du terme et que nos échanges ont été profitables à l’un comme à l’autre. Je vous promets donc une lettre sérieuse très prochainement et vous prie de croire, en attendant, à mon respectueux souvenir.
Avatar de l’utilisateur
Abbé Zins
Messages : 4602
Inscription : sam. 07 oct. 2006 2:00

Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

Message par Abbé Zins »

11 septembre 1987

A cette date est mentionnée, en une annotation faite sur la lettre précédente du Professeur Salet, une réponse de ma part, dont aucun double ne se trouve en mes archives.

Il semble, notamment par ce qu’en écrit M. Salet au début de sa lettre suivante, qu’elle n’ait consisté qu’en un bref mot d’assurance de prières pour H. Le Caron.
Avatar de l’utilisateur
Abbé Zins
Messages : 4602
Inscription : sam. 07 oct. 2006 2:00

Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

Message par Abbé Zins »

Georges SALET
à Chatelguyon

Le 17 Septembre 1987

à

Monsieur l'Abbé ZINS
TOURS


Monsieur l'Abbé,

(Je reçois à la seconde votre lettre du 11 qui m’a suivi ici. Merci de prier pour H. Le Caron.)

Je suis enfin en vacances jusqu'à la fin du mois (du moins je l'espère) ici à Chatelguyon et j'en profite pour vous écrire un peu plus longuement que je ne l'avais fait à Villers.

Bien que je l'aie fait au mois d'Août, je vous accuse à nouveau réception de votre lettre sympathique du 5 Août dernier.

Non, notre dialogue n'est pas un dialogue de sourds, du moins au sens propre, et vous verrez dans mon N° 81 qui a été expédié mardi et tout entier consacré aux sacres envisagés par Mgr. Lefebvre, que j'ai utilisé l'indication que vous m'aviez donnée sur le Général Weygand qui a conservé toute sa lucidité jusqu'à l'âge de 90 ans.

Vous avez très bien jugé en disant que 80 ans est l'âge de l'éternité et c'est bien comme cela que je le ressens. Malgré des épreuves dont personne n'est exempt, le Seigneur m'a comblé ici-bas sous tous les rapports : famille, carrière, etc.

Mais je ressens de plus en plus que toutes les bénédictions temporelles, que j'apprécie certes, ne sont exactement rien à côté des biens éternels.

Ce n'est même plus pour moi une question de foi mais une sorte d'évidence. Je suis donc bien parvenu, d'une certaine manière, à "l'Age de l'éternité" et je m'en réjouis.
Avatar de l’utilisateur
Abbé Zins
Messages : 4602
Inscription : sam. 07 oct. 2006 2:00

Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

Message par Abbé Zins »

Suite L GS du 17/9/1987

Vous dites d'autre part aimablement que mon attitude à votre égard vous est grandement sympathique parce que, entre autres, nos très graves divergences et votre "plume très acérée" ne m'ont pas fait rompre mes relations avec vous.

Je vous dis tout de suite : votre "plume acérée" ne me choque pas car j'aime la franchise. De plus, je vous rends bien la pareille en portant contre vous une accusation fort désagréable à entendre et que je vais, comme vous allez le voir, renouveler dans cette lettre, à savoir que vous ne savez pas raisonner.

Voici, en effet, et en toute franchise, le jugement que je porte finalement sur vous : Vous avez une grande foi, l'amour de la vérité et le désir de la faire partager aux autres ce que je ne puis évidemment qu'approuver.

Vous avez d'autre part de très vastes connaissances sur les questions théologiques, beaucoup plus vastes que les miennes et c'est une des raisons pour lesquelles notre dialogue, bien que pénible, m'est finalement utile.

Mais, je le répète, c'est sur le plan du raisonnement que je trouve chez vous une très très grave déficience.

Notez bien que celle-ci n'est pas incompatible avec l'intelligence.

Il y a d'innombrables exemples de gens intelligents parvenus à la notoriété ou à de hautes situations, qui sont incapables de raisonnement rigoureux.

Notez bien qu'il s'agit, du moins chez les gens intelligents, d'une déficience de l'esprit guérissable. Mais il faut évidemment d'abord en prendre conscience.

Mais il est temps de sortir de ces généralités et de reprendre notre discussion interrompue.
Avatar de l’utilisateur
Abbé Zins
Messages : 4602
Inscription : sam. 07 oct. 2006 2:00

Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

Message par Abbé Zins »

Suite L GS du 17/9/1987

Selon votre souhait qui est aussi le mien, je ne traiterai ici que d'un seul sujet : "Saint Bellarmin".

J'aurai ainsi répondu à une partie très importante de votre lettre de 17 pages du 28 Avril 87 puisqu'une douzaine de pages de cette lettre sont consacrées à cette question.

LE "SOPHISME DE SAINT BELLARMIN"

Comme vous le savez, je rejette toutes les thèses répondant aux deux formules "deponendum" et "depositus est". .

Le "deponendum" est faux parce que la conclusion découle de prémisses fausses. Mais le raisonnement est impeccable.

Les thèses s'apparentant au "Depositus est", notamment celle de Saint Bellarmin, s'appuyent sur des prémisses justes mais la conclusion est fausse parce qu'obtenue au moyen d'un raisonnement sophistique.

Le Petit Larousse, édition 77, définit le sophisme comme

"un raisonnement qui n'est logique qu'en apparence"

Le raisonnement de Bellarmin est logique en apparence mais il est vicieux et c'est pourquoi j'ai parlé de "sophisme".

Le raisonnement est vicieux mais, comme dans tous les sophismes, le vice y est caché. Et la douzaine de pages de votre lettre d'Avril me montre à l'évidence que, en dépit de mes explications, vous avez été incapable de le voir.

Votre lettre comporte quelques remarques justes dont je parlerai plus bas mais portant sur des détails sans importance pour la conclusion.
Avatar de l’utilisateur
Abbé Zins
Messages : 4602
Inscription : sam. 07 oct. 2006 2:00

Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

Message par Abbé Zins »

Suite L GS du 17/9/1987

Votre critique de mon argumentation se réduit surtout à l'affirmation que je n'aurais pas compris que dans la thèse de Saint Bellarmin, l'Eglise ne juge pas le Pape mais quelqu'un qui ne l'est plus du fait de son hérésie.

Persuadé que vous êtes que cela m'a échappé, vous me reprochez d'avoir employé le mot "Pape" là où il aurait fallu écrire "celui qui fut Pape", reproche d'autant plus injustifié qu'on aurait pu le faire à Saint Bellarmin lui-même. Vous avez, en effet, écrit vous-même au milieu de la page 9 :

"Saint Robert emploie lui aussi une fois le mot Pape pour désigner la personne qui l'aurait été jusque là : "Un Pape manifestement hérétique cesse de lui-même d'être le Pape et la Tête de la même façon qu'il cesse d'âtre un chrétien et un membre de l'Eglise". Il veut dire qu'il serait Pape jusqu'au moment de son hérésie manifeste par laquelle il cesse à l'instant d'être le Pape.

Vous n'aviez pas besoin de me donner cette explication car, remis dans son contexte, ce qu'a voulu dire Saint Bellarmin est évident. Mais, dans votre persuasion que je n'y ai rien compris, vous vous êtes donné la peine, bien inutile, de me dire ce que j'aurais du écrire si j'y avais compris quelque chose :

"Vos termes imprécis montrent votre confusion et votre incompréhension puisque vous appelez ici encore Pape (en prenant ce terme dans son sens propre et effectif) ce que eux disent ne plus l'être. Il faudrait donc dire pour rendre vraiment compte de leur enseignement :
"Ils enseignaient que puisqu'un hérétique manifeste ne peut pas (ou plus) être Pape, ce ne serait pas juger le Premier Siège que de juger et punir un hérétique manifeste même autrefois Pape, jusqu'au moment de la manifestation de son hérésie, puisque l'Eglise jugerait et punirait quelqu'un qui n'est pas (ou plus) Pape."
(p. 7)

Mais c'est bien le sens que j'ai toujours donné à la thèse de Bellarmin et tout le monde m'avait compris sauf vous. Mais j'avais ajouté, ce qui ne vous plaît pas, que cette thèse était sophistique.

Bien que je pense avoir été clair dans mes divers articles, je vais tout de même essayer de vous bien préciser où se situe le sophisme en espérant que vous voudrez bien cette fois porter sérieusement attention à ce que je vais écrire.
Avatar de l’utilisateur
Abbé Zins
Messages : 4602
Inscription : sam. 07 oct. 2006 2:00

Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

Message par Abbé Zins »

Suite L GS du 17/9/1987

POURQUOI TOUTES LES THESES "DEPOSITUS EST" SONT SOPHISTIQUES

Comme je l'avais dit, Saint Bellarmin et Saint Alphonse avaient assez de bon sens pour comprendre que ce serait livrer l'Eglise à l'anarchie que de laisser chacun juger librement si le Pape (pardon, l'occupant du Siège de Pierre) est ou non hérétique. J'avais donc dit, avec texte de Saint Alphonse à l'appui, que c'est pour cela que ces deux auteurs estimaient nécessaire une "Déclaration" d'hérésie émanant d'un organisme officiel de l'Eglise.

Et j'avais ajouté qu'une telle Déclaration ne pourrait avoir lieu qu'après un jugement d'un tel organisme. La justice exige en effet que nul ne soit déclaré coupable sans qu'une autorité ait examiné soigneusement les chefs d'accusation.

Et j'avais cité un texte de Bellarmin corroborant ce point de vue.

Or, vous avez écrit en bas de votre p. 6 et en haut de la p. 7 que j'inventais et que j'attribuais à ces deux auteurs une des formes du "deponendus est".

Je n'avais pourtant fait que copier un texte de Saint Alphonse et un autre de Saint Bellarmin. Vous les citez d'ailleurs vous-même, le premier en haut de la page 17 de votre "Sub Tuum" N° 2 et le second à la page 15.
Je vous copie sans rien ajouter ni retrancher et en respectant vos mises en majuscules :

"Si jamais le pape, comme personne privée, tombait dans l'hérésie, il serait A L'INSTANT DECHU DU PONTIFICAT; car, comme il serait alors hors de l'Eglise, l'Eglise devrait NON PAS LE DEPOSER, puisque personne n'a d'autorité sur le Pape, MAIS LE DECLARER DECHU DU PONTIFICAT.
Il est hors de doute que si un Pape était hérétique déclaré...il pourrait NON PAS ETRE DEPOSÉ par un Concile, mais ETRE DECLARE DECHU DU PONTIFICAT." (Oeuvres complètes, t. 9, p. 232 et 262)


J'avais de même cité quelque part un texte de Saint Bellarmin, le même ou analogue à celui que vous reproduisez vous-même à la p. 15 du N° 2 de votre "Sub Tuum". Je vous copie en respectant encore votre typographie mais c'est moi qui souligne l'avant dernière phrase :

"C'EST POURQUOI UN HERETIQUE MANIFESTE NE PEUT PAS ETRE PAPE...Un Pape manifestement hérétique cesse de lui-même d'être le Pape et la tête, de la même façon qu'il cesse d'être un chrétien et un membre de l'Eglise ; et pour cette raison il peut être jugé par l'Eglise. C'est l'avis de tous les anciens Pères..."

Ce n'est donc pas contredire ces deux docteurs que d'affirmer, au nom du bon sens, qu'en cas d'hérésie du Pape (pardon de l'occupant du Siège de Pierre), il devrait y avoir "Déclaration" de son hérésie par une autorité officielle de l'Eglise, laquelle "Déclaration" devrait être précédée, si du moins l'on voulait respecter les règles de la justice, d'un examen soigné du cas, examen appelé universellement un jugement. Il peut être fait à huis-clos. Mais il faut qu'il ait lieu car on voit mal une autorité officielle de l'Eglise déclarer sans un examen sérieux de la question que le Pape (pardon, l'occupant du Siège de Pierre) est déchu du Pontificat parce qu'il est hérétique.

Malgré vos dires, j'avais parfaitement compris que, dans l'esprit de nos deux docteurs, le jugement dont ils parlent est postérieur à la perte du Pontificat et ne saurait donc en être la cause. Mais je dis qu’il doit être forcément antérieur à la "Déclaration".

Comme, en dehors de la mort ou de la démission, l'hérésie est le seul motif de perte du Pontificat (1), on peut dire :

(1) A la condition de bien préciser que c'est le Christ Lui-même qui destitue son Vicaire et que les hommes n'ont donc pas à s'en mêler, je ne vois aucun inconvénient à dire avec St. Bellarmin que l'hérésie fait perdre immédiatement le Pontificat.

Il est très vraisemblable que ce soit là une règle que Dieu, dans sa Sagesse, s'est imposée à Lui-même et qu'il Lui est très facile de mettre en application en faisant passer son Vicaire dans l'autre Monde.
Avatar de l’utilisateur
Abbé Zins
Messages : 4602
Inscription : sam. 07 oct. 2006 2:00

Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

Message par Abbé Zins »

Suite L GS du 17/9/1987

Comme vous le voyez, j'admets tous les principes de Saint Bellarmin mais je rejette ses conclusions.

"Hérésie = Perte du Pontificat"
"Non hérésie = Conservation du Pontificat"
Nos auteurs admettent d'autre part ce principe que
"Le Premier Siège ne peut être jugé par personne"

Voici alors en quoi consiste le "Sophisme de Saint Bellarmin". Il est de la forme que l'on appelle souvent "cercle vicieux" et que je vais d'abord décrire.


DIFFERENTES FORMES DE SOPHISMES - LE SOPHISME DU CERCLE VICIEUX

J'utiliserai les notions élémentaires de la "Logique des propositions" que l'on enseigne maintenant en Seconde. Cette logique est identique quant au fond à celle d'Aristote mais d'un maniement plus facile.

L'implication

Soient deux propositions A et B susceptibles toutes les deux d'être vraies ou fausses.

Dire que "A implique B", "A entraine B" veut dire très exactement
A est vrai, alors B et vrai."
Et l'on note : A ==> B C'est une "implication".

Je précise : Cette formule signifie que l'on a démontré d'une manière ou d'une autre que si la proposition A est vraie, alors la proposition B l'est aussi.

A est le point de départ, appelé souvent "hypothèse", de cette démonstration et B sa conclusion.
On appelle "Non A" la proposition qui nie A. Si, par exemple, la proposition A est "Paul n'est pas blond”, la proposition "Non A" sera "Paul est blond".

Il est utile de se rappeler cette évidence que si B est faux, alors A l'est aussi. Autrement dit, A ==> B, entraîne ‘limplication contraposée” Non B ==> Non A.

Une forme très courante de sophisme consiste à prétendre que s'il est vrai que A => B, alors, B => A. C'est souvent vrai mais pas toujours.

Mais le sophisme de Saint Bellarmin est d'un autre genre : c'est le sophisme du "cercle vicieux". Voici en quoi il consiste.

Soient un nombre quelconque de propositions, 5 par exemple s'impliquant en cercle ce qui veut dire que l'on a :

A ==> B ==> C ==> D ==> E ==> A

Il est clair que si l'on a pu démontrer que l'une quelconque des 5 propositions A B C D E est vraie, alors les quatre autres le sont nécessairement.

Le sophisme du cercle vicieux consiste à conclure qu'il résulte des seules cinq implications marquées sur le cercle que les cinq propositions sont vraies. Ce n'est pas exact parce que ces cinq propositions peuvent être toutes fausses.

La seule chose exclue par la Logique est que certaines d’entre elles soient vraies et les autres fausses.
Avatar de l’utilisateur
Abbé Zins
Messages : 4602
Inscription : sam. 07 oct. 2006 2:00

Re: Controverse Georges Salet - Abbé V.M. Zins (8/1986 - 5/1

Message par Abbé Zins »

Suite L GS du 17/9/1987

APPLICATION A LA THESE DE SAINT BELLARMIN

Le raisonnement de Bellarmin, ne vous en déplaise, relève de ce sophisme comme l'ont bien senti de nombreux théologiens qui l'on rejeté pour cette raison. Montrons pourquoi.

Considérons les trois propositions :
A "L'occupant du Siège de Pierre est hérétique."
B "L'occupant du Siège de Pierre est déchu du Pontificat.
C "Le jugement de l'Eglise qui a précédé la "Déclaration" que l'occupant du Siège de Pierre est déchu du Pontificat et cette Déclaration ont été légitimes et traduisent bien la réalité.

Je dis que les principes posés par Saint Bellarmin entraînent que ces trois propositions s'impliquent en cercle c'est à dire que l'on a :

A ==> B ==> C ==> A

C'est immédiatement évident pour A ==> B et B ==> C puisque l'hérésie entraîne la déchéance et que la déchéance entraine
légitimité d'un jugement.

D'autre part, le principe que le Premier Siège n'est jugé par personne a pour conséquence que si l'occupant du Siège de Pierre n'est pas hérétique, alors un jugement qu'il est hérétique ne serait pas légitime et ne correspondrait pas à la réalité.

Ce qui s'exprime par la formule : Non A ==> Non C ; formule qui entraine elle-même par application de la règle de l'implication contraposée et en se souvenant qu'une double négation équivaut à une affirmation : C ==> A.

Il y a donc bien implication en cercle mais je vais cependant mettre les points sur les "i" :
A ==> B veut dire : "S'il est vrai que l'occupant du Siège de Pierre est hérétique, alors il est vrai qu'il est déchu du Pontificat."

B ==> C veut dire : "S'il est vrai que l'occupant du Siège de Pierre est déchu du Pontificat, alors il est vrai que le jugement et la Déclaration de sa déchéance sont légitimes et traduisent bien la réalité."
C ==> A veut dire : "S'il est vrai que le jugement et la Déclaration que l'occupant du Siège de Pierre a été déchu du Pontificat ont été légitimes et traduisent bien la réalité, alors il est vrai que cet occupant est hérétique"

Si nous n'avons pas d'autres éléments, alors la logique nous oblige à conclure que ces trois propositions sont toutes les trois vraies .... OU toutes les trois fausses. Ce qui voudrait dire que l'occupant du Siège de Pierre n'est pas hérétique, qu'il n'est pas déchu du Pontificat et que le jugement et la Déclaration de déchéance n'étaient pas légitimes et ne traduisaient pas la réalité.

Il suffirait pour que les trois propositions A, B et C soient vraies que l'on puisse démontrer sans s'appuyer sur les deux autres que l'une d'entre elles, celle que l'on voudra, est vraie ; mais c'est impossible puisqu'une Déclaration d'hérésie ne serait légitime que si l'on savait déjà que l' occupant du Siège de Pierre est déchu pour cause d'hérésie. On tourne donc en rond, on est enfermé dans un cercle.

Vous allez m'objecter, je le crains , qu'il est certain, évident, que Jean Paul II est hérétique. C'est bien possible mais comment le savez-vous puisque le principe que le Premier Siège n'est jugé parpersonne vous oblige à ne déclarer l'occupant du Siège de Pierre hérétique...... que si vous savez déjà qu’il est déchu du Pontificat parce qu'hérétique !

Mais foin de toute cette logique : Le simple bon sens montre que le principe que le Premier Siège ne peut être jugé par personne suffit à montrer, qu'à moins d'une révélation divine, on ne saurait déclarer l'occupant du Siège de Pierre déchu du Pontificat pour cause d'hérésie.

Et que c'est un grossier sophisme que de dire : "Nous n'avons pas jugé que le Pape était hérétique puisque celui que nous avons déclaré tel n'était plus Pape".

Et ne vous en déplaise, tous les théologiens de bon sens ont rejeté le "Depositus est" pour cette raison.
Répondre

Revenir à « Doctrine et débats sur les principes »

Qui est en ligne ?

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 0 invité