SERMON POUR LE CINQUIÈME DIMANCHE APRES L'ÉPIPHANIE.
Explication de l'Évangile.
Domine, nonne bonum semen seminasti in agro tuo ? Unde ergo habet zizania ?
Seigneur, n'avez-vous pas semé de bon grain dans votre champ ? D'où vient donc qu'il s'y trouve de l'ivraie ? Matth., XIII, 27.
Lorsque le Seigneur descendit sur le mont Sinaï pour donner des lois aux Hébreux, il apparut, dit la sainte Écriture, sous la forme du feu : « L'aspect de la gloire du Seigneur était comme un feu ardent au plus haut de la montagne, en présence de tous les enfants d'Israël. » Erat species gloriæ Domini, quasi ignis ardens super verticem montis, in conspectu filiorum Israel. Exod., XXIV, 17. Tout homme raisonnable doit reconnaître là un dessein particulier de la divine sagesse ; car les œuvres de Dieu sont parfaites, et toutes, soit dans l'ordre de la nature, soit dans l'ordre de la grâce, ont leur raison d'être. Puis donc qu'il pouvait manifester sa gloire aux hommes sous une autre image, pourquoi a-t-il choisi celle du feu ? Il me semble en trouver la principale raison dans les propriétés de cet élément, qui figure très-bien la nature de la divine bonté. En effet, de tous les éléments, c'est le feu qui tend avec plus de force à se répandre dans les autres corps, à les pénétrer de sa vertu et à se les rendre semblables.
Mettez en contact avec lui de l'huile, du bois, un morceau de fer, même de l'eau, il s'efforce aussitôt de les changer en sa nature, et de leur communiquer sa forme et son éclat. Or, telle est la nature de la bonté de Dieu, qui se répand partout, embrasse tout, et tâche, dans une certaine mesure, de tout amener à sa ressemblance. C'est ce qu'atteste cette prière de Notre-Seigneur Jésus Christ à son Père : « Je leur ai donné, dit-il, la gloire que vous m'avez donnée, afin qu'ils soient un comme nous sommes un. Je suis en eux, et vous en moi, afin qu'ils soient consommés en un, » ego claritatem quam dedisti mihi, dedi eis, ut sint unum, sicut et nos sumus unum. Ego in eis, et tu in me, ut sint consummati in unum, Joann., XVII, 22, 23. Vous voyez ici une communication évidente de la gloire divine, conséquence nécessaire de l'unité des esprits.
La nature de la bonté de Dieu ne se révèle pas moins clairement dans la parabole du Père de famille, qui sort à différentes heures du jour et loue des ouvriers pour sa vigne, c'est-à-dire, appelle le genre humain à la pratique de la vertu et de piété, qui nous rend semblables à Dieu, et imprime en nous une image de ses perfections; dans la parabole du semeur, qui répand la semence sur toute la surface de son champ, même dans les parties que les pierres ou les épines doivent rendre stériles ; enfin dans la parabole de ce dimanche, où nous voyons : 1° avec quel soin et quelle sollicitude le céleste Père de famille cultive son champ, c'est-à-dire, travaille au salut des hommes ; 2° par quelle ruse le démon, ennemi acharné du genre humain, s'efforce d'empêcher ce bienfait de la providence divine ; 3° quelle occasion favorable il trouve pour exécuter ses funestes desseins ; 4° enfin quelles sont les causes d'un si grand mal. Le développement de ces quatre points fera la matière de ce discours.
(à suivre)