Voici quelques rappels, extraits du Traité de Droit Canon, publié sous la direction de Raoul NAZ et datant de 1954.
Raoul Naz, dans le Traité de Droit Canonique, tome III, livre III a écrit :
Des Temps Sacrés
Définition. — CAN. 1243.
Les temps dits sacrés, ou consacré, à Dieu, sont les jours de fête ainsi que les jours d'abstinence et de jeûne (fixés par l'autorité ecclésiastique).
Si Dieu, en effet, doit être honoré par un culte direct, il doit l'être aussi par la mortification, considérée comme un moyen de purifier l'âme pour la mettre en état de rendre ses devoirs au Seigneur et de lutter contre le péché. Jejunium animae optima custodia, corporis socius securus, dit S. Basile.
On distingue deux sortes de temps sacrés. Les uns doivent être observés par l'Église universelle, les autres ne sont déterminés que pour les habitants d'une circonscription donnée.
Réglementation générale des temps sacrés. — CAN. 1244.
§ 1. Il appartient dans l'Église à l'autorité suprême de déterminer, de transférer ou d'abolir les jours de fête, de même que les jours d'abstinence et de jeûne communs à toute l'Église.
§ 2. Les Ordinaires des lieux peuvent ordonner des jours particuliers de fête, de jeûne ou d'abstinence pour leurs diocèses ou leurs territoires, mais seulement per modum actus
Longtemps les Papes ont laissé aux Évêques la faculté d'établir des fêtes locales perpétuelles. Urbain VIII est le premier qui, par la Constitution Universa (13 septembre 1642), les ait engagés à ne plus en user, mais c'est seulement le Code qui a pris dans le même sens une mesure définitivement restrictive en décidant au can. 1244, §2, que les Ordinaires locaux ne peuvent pas instituer pour leur territoire des jours de fête, de jeûne ou d'abstinence obligatoires à perpétuité. Ils ne peuvent en établir que per modum actus, c.-à-d. à célébrer une ou deux fois.
En ne reconnaissant ce pouvoir qu'aux Ordinaires locaux, le Code semble le refuser aux supérieurs majeurs des religieux. Il n'y a aucun doute en ce qui concerne l'établissement des fêtes; mais il semble, d'après le can. 1253, que les supérieurs religieux aient le pouvoir pour imposer des jours de jeûne ou d'abstinence par la voie de la règle, sans qu'il y ait strict précepte ecclésiastique, c.-à-d. sans engager leur pouvoir de juridiction.
Réglementation particulière. — CAN. 1245.
§ 1. Non seulement les ordinaires des lieux mais encore les curés, dans des cas isolés et pour un juste motif, peuvent dispenser leurs sujets pris individuellement et les familles, même hors de leur territoire, et dans leur territoire, même les étrangers, de la loi commune de l'observance des fêtes, de même que de l'observance de l'abstinence et du jeûne, ou encore des deux.
§ 2. Les ordinaires, pour le motif spécial d'un grand concours de peuple ou à cause de la santé publique, peuvent dispenser tout leur diocèse ou un lieu déterminé du jeûne et de l'abstinence, ou encore des deux lois en même temps.
§ 3. Dans une religion cléricale exempte, les supérieurs ont le même pouvoir de dispenser que les curés à l'égard des personnes visées par le can. 514, §1.
La réglementation dite particulière des temps sacrés est celle qui résulte des dispenses dérogeant à la loi générale. Le droit canonique ne réserve pas au pouvoir suprême la faculté d'accorder ces dispenses. Il la reconnait aux Ordinaires et aux curés, considérés comme étant plus proches des circonstances susceptibles de les motiver et mieux à même de les apprécier.
Leur pouvoir de dispense concerne toutes les observances propres aux temps sacrés : assistance à la messe, jeûne et abstinence.
Les pouvoirs respectifs des Ordinaires, des curés et des supérieurs religieux ne sont d'ailleurs pas les mêmes. Les dispenses collectives relèvent des Ordinaires seuls; les dispenses individuelles relèvent des curés et des supérieurs religieux, et des Ordinaires, a fortiori.
1° Dispense individuelle - Elle peut être accordée par le curé, par le supérieur, majeur ou local, des religions cléricales exemptes aux conditions suivantes :
a) Dans un cas particulier, ce qui ne signifie pas pour un jour, mais pour aussi longtemps que durera le motif allégué en vue de justifier la concession de la dispense.
b) A chacun de leurs sujets. Donc, pour le curé à tous ses paroissiens. Pour le supérieur, à tous ceux que vise le canon 514, §1, c'est-à-dire les personnes, religieux ou laïques, qui se trouvent dans leur maison de façon permanente pour raison de service, d'éducation, d'hospitalité ou de maladie.
Le curé peut encore accorder dispense à ces individualités morales que sont les familles. De même les supérieurs aux groupements analogues au groupe familial que forment dans leur maison : les scolastiques, les hôtes, les novices, etc.
2° Dispense collective - Celle-ci est réservée aux Ordinaires, qui peuvent l'accorder à des groupes plus importants que la famille, et même à leur diocèse tout entier.
La concession de la dispense est un acte de juridiction personnelle; Celui qui l'exerce peut donc s'en servir même hors de son territoire, à condition qu'il s'agisse de ses sujets.
La même juridiction présente aussi un caractère territorial, car celui qui l'exerce dans son territoire peut l'appliquer à tous ceux qui s'y trouvent, simples passagers ou résidents, sans qu'ils aient à y posséder ni domicile, ni quasi-domicile.
Étant aussi de juridiction ordinaire, le pouvoir de dispenser peut être délégué, par ex. aux confesseurs.
Dans tous les cas la dispense doit être motivée par une cause spéciale, c.-à.-d. par un événement qui ne se produit qu'une ou deux fois par an, quel qu'en soit le caractère (1); par un concours extraordinaire de foule, même s'il intéresse les habitants d'une seule paroisse (2) ou par les exigences de la santé publique en temps d'épidémie.
L'existence du juste motif est requise pour la validité de la dispense. Sa gravité doit être appréciée d'après la gravité de la loi à laquelle il s'agit de déroger. Les motifs sont d'ordre interne ou intime, tenant à la psychologie du sollicitant; ou d'ordre externe, tenant aux dispositions du concédant qui a des raisons de se montrer libéral, ou au concessionnaire qui est spécialement méritant, ou au bien commun, telle la perspective de la violation générale d'une loi que l'Ordinaire veut éviter.
L'effet de la dispense est radical. Par ex. en matière de jeûne ou d'abstinence, leur anticipation n'est plus requise comme avant le Code, de même que l'usage d'aliments gras, quand il est permis, n'est plus limité à un seul plat ou à un seul repas. De même le pouvoir d'accorder dispense n'implique pas pouvoir de commuer en d'autres œuvres celles dont on dispense. Pour substituer une obligation légale à une autre, il faudrait jouir pleinement du pouvoir législatif, or la faculté d'accorder une dispense n'implique pas la possession en propre d'un tel pouvoir. Tout ce que le concédant peut faire, c'est prescrire une bonne œuvre destinée à jouer le rôle de motif complémentaire, justifiant la concession d'une dispense qui, sans elle, risquerait de n'être pas assez motivée.
Si la dispense a un effet radical, elle est cependant d'interprétation stricte. Ainsi, relativement au repos du dimanche, la S. Cong. de la Propagande a répondu à un vicaire apostolique que la permission donnée de travailler le dimanche, à l'occasion de la moisson, autorisait tous les travaux relatifs à celle-ci, mais non pas toutes les œuvres serviles, en particulier celles qui seraient étrangères à la moisson (3).
(1) La S. Congr. du Concile a autorisé les évêques des États-Unis à dispense du jeûne et de l'abstinence à l'occasion des fêtes civiles (15 octobre 1931).
(2) Commiss. d'interprét. du Code, 12 mars 1929 (Acta, t. XXI, p. 170).
(3) 2 décembre 1922, Sylloge, Vatican, 1939, p. 208.
Computation des temps sacrés. — CAN. 1246.
Les jours qui constituent les temps sacrés doivent être comptés de minuit à minuit, réserve faite de la computation spéciale prévue par le can. 953.
Il s'agit du gain des indulgences qui peut commencer non pas le jour fixé dès minuit, mais la veille à partir de midi.
Les jours sacrés sont répartis en deux groupes, les jours de fête ou de joie et les jours de pénitence.