A. da Silveira sur l'hérésie exprimée par des gestes ou omissions

chartreux
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Re: A. da Silveira sur l'hérésie exprimée par des gestes ou omissions

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A. da Silveira, traduit par le chartreux a écrit :
4. Personne ne conteste qu'on peut tomber dans une hérésie sans prononcer un mot

Avant de passer à certaines difficultés liées à cette thèse (difficultés qui sont certes d'une importance fondamentale), nous tenons à démontrer qu'il n'y a rien de nouveau ou d'original dans la doctrine que nous venons d'exposer. C'est au contraire quelque chose d'admis par les théologiens, comme nous l'avons déjà dit. Mais puisque le préjugé faux suivant lequel ne peut être hérétique que qui exprime son hérésie par des paroles ou des écrits est si tenace partout aujourd'hui, nous sommes obligés de donner une longue liste de citations de théologiens réputés :

De Lugo, disp. XXIII, sect. II, no. II a écrit : La règle générale est que, pour que l'hérésie externe soit caractérisée et passible de censure, il est nécessaire et suffisant que l'hérésie interne soit manifestée par des signes extérieurs. Ces signes sont habituellement divisés en deux groupes : les paroles et les actes.

Dans les "paroles" on inclut les mouvements de tête, de main ou d'une autre partie du corps, ainsi par exemple le cas où quelqu'un se fait comprendre en faisant des signes avec ses doigts.

Dans les "actes" il faut inclure l'omission de certains actes externes, par ce qu'il y a des cas où une omission manifeste l'hérésie interne autant qu'un acte positif ; et c'est pourquoi il est fréquent que des hérétiques se trahissent en ne se comportant pas comme des Catholiques le feraient.
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Re: A. da Silveira sur l'hérésie exprimée par des gestes ou omissions

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A. da Silveira, traduit par le chartreux a écrit :
Merkelback, p. 570 a écrit : L'hérésie est externe quand elle est manifestée par des signes extérieurs (paroles, signes, actes, omissions d'actes).
Prummer, p. 365 a écrit : L'hérésie externe est une erreur contre la foi, rendue manifeste par une parole ou quelqu'autre signe.
Tanquerey, [i]Syn. Theol., Mor. et Past.[/i], p. 475 a écrit : Pour encourir une telle excommunication latae sententiae, réservée spécialement au Souverain Pontife, il est nécessaire que l'hérésie, après avoir été conçue intérieurement, soit manifestée extérieurement par une parole, un écrit ou un acte.
Wernz-Vidal, p. 444 a écrit : À l'hérésie interne s'ajoute l'hérésie externe quand il y a une manifestation extérieure suffisante, c'est-à-dire exprimée par des paroles, des signes ou des actes suffisamment clairs.
De Bruyne, col. 490 a écrit : L'hérésie peut être manifestée extérieurement d'une manière quelconque par des signes, des écrits, des paroles ou des actes, dès lors qu'il est suffisamment clair qu'il y a une adhésion réelle et nettement exprimée, et par ailleurs délibérée c'est-à-dire formelle.
Noldin, [i]Com. de Poenis Eccl.[/i], vol. 1, p.48 a écrit : Pour encourir l'excommunication, il est nécessaire que l'hérésie conçue intérieurement soit manifestée extérieurement en un signe, une parole, un acte ou un écrit - même si personne d'autre n'est présent, n'entend ou ne lit.
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Re: A. da Silveira sur l'hérésie exprimée par des gestes ou omissions

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A. da Silveira, traduit par le chartreux a écrit :
Genicot, p. 647 a écrit : Pour que l'excommunication soit encourue, peu importe si l'hérésie est manifestée par un individu seul ou en présence d'autres ; peu importe que ce soit par une parole, un écrit ou un acte, dès lors que l'hérésie apparaît clairement dans l'acte.
Peinador, p. 103 a écrit : L'hérésie interne est celle qui est conçue mentalement, mais qui n'est manifestée par aucun signe extérieur. L'hérésie externe est celle qui est déclarée par des signes extérieurs : des paroles, des écrits, des actes, des dénégations, etc.
Zalba, p. 28 a écrit : L'hérésie extérieure peut être manifestée par des omissions, paroles ou autres signes perceptibles extérieurement.
Lorio, p. 258 a écrit : L'excommunication est encourue par les hérétiques, c'est-à-dire ces Chrétiens qui nient ou doutent avec pertinacité de vérités de foi proposées par l'Église, non seulement intérieurement, non seulement extérieurement, mais à la fois intérieurement et extérieurement par le truchement d'un signe extérieur - une parole, un acte ou un écrit.
Miguelez-Almso-Cabreros, p. 845 a écrit : Pour qu'il y ait délit, il est nécessaire que l'apostasie, le schisme ou l'hérésie soit manifestée extérieurement par des actes ou des paroles.
La même doctrine est défendue par les passages suivants : Suarez, disp. XIX, sect. IV, n.4-5 ; Disp. X G, sect. II n.8 ; Reiffenstuel, n.26 ; Schmalz-Grueher, II, 98 ; D'Annibale, In Constitutionem... II.31 ; Lehmkohl, p. 656 ; Coronato, p. 280 ; Cappello, p. 585 ; Ferreres, p. 743 ; Wernz-Vidal, p. 445, 449, 450 ; Michel, col. 2242-2243 ; Noldin, vol. II, pg. 26 ; Brys, p. 502 ; Arregul, p. 74 ; Peinador, p. 74 ; Sipos, p. 608 ; Zaira, p. 973.



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Re: A. da Silveira sur l'hérésie exprimée par des gestes ou omissions

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A. da Silveira, traduit par le chartreux a écrit :
5. Des difficultés importantes

Comme expliqué plus haut, cette thèse que l'on peut devenir hérétique par de simples actes ne va pas sans difficultés notables. Examinons quelques-unes d'entre elles.

5. a. Un acte peut-il être vraiment univoque ?

Un acte, une attitude, un geste ou une omission peuvent toujours être interprétés de plusieurs manières différentes. De plus, l'acte peut être le résultat d'une contrainte, d'une diminution des facultés mentales, etc. Ne s'expose-t-on pas à se rendre responsable d'une injustice grave en acceptant ainsi qu'il est possible de commettre le délit d'hérésie (et donc d'être excommunié et exclu de l'Église), par le simple fait d'agir d'une certaine façon ?

La réponse est évidente. Il est incontestable que certains actes sont ambigus et susceptibles d'interprétations différentes. De tels actes ne rendent pas leur auteur suspect d'hérésie. Mais il est tout aussi indéniable que certains actes ou ensembles d'actes sont univoques, ce qui veut dire qu'ils n'ont qu'un seul sens possible. La possibilité d'une contrainte est bien réelle, mais elle n'est pas plus significative pour les actes que pour les déclarations orales ou écrites.
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Re: A. da Silveira sur l'hérésie exprimée par des gestes ou omissions

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A. da Silveira, traduit par le chartreux a écrit :
Pour éviter des jugements erronés sur des actions causées par la contrainte, la peur, l'ignorance, l'erreur, etc., les législateurs ont élaboré des règles sages et méticuleuses pendant des siècles. De telles précautions sont évidemment de rigueur en droit canon. Dans le cas que nous considérons présentement des hérésies par acte, le délit canonique n'est caractérisé que quand il est certain que quand le contrevenant agit en pleine connaissance de cause, que son attitude montre une pertinacité criminelle et un état d'esprit hérétique, etc. Nous ne devons donc pas juger trop hâtivement des actes où une explication par l'hérésie est seulement possible, mais il est indéniable que dans bien des cas, l'esprit d'une personne est manifesté sans ambiguïté dans son comportement.

Quand nous disons qu'il ne faut pas juger hâtivement des actes ambigus, nous sommes obligés d'ajouter une nuance importante. Disons-nous qu'un Catholique ne devrait ne jamais soupçonner son prochain ? Que tout soupçon est un jugement téméraire ? Loin de là ! La question du jugement téméraire a été analysée à fond par le Dr. P. Correa de Oliveira dans ses articles publiés dans le Legionario en 1941, articles qui font autorité. Après avoir démontré que la sévérité est une vertu indispensable pour les hommes de toutes les conditions, ces articles montrent que Notre-Seigneur a pratiqué cette vertu et l'a recommandée avec insistance.
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Re: A. da Silveira sur l'hérésie exprimée par des gestes ou omissions

Message par InHocSignoVinces »

Chartreux a écrit :

Quand nous disons qu'il ne faut pas juger hâtivement des actes ambigus, nous sommes obligés d'ajouter une nuance importante. Disons-nous qu'un Catholique ne devrait ne jamais soupçonner son prochain ? Que tout soupçon est un jugement téméraire ? Loin de là ! La question du jugement téméraire a été analysée à fond par le Dr. P. Correa de Oliveira dans ses articles publiés dans le Legionario en 1941, articles qui font autorité. Après avoir démontré que la sévérité est une vertu indispensable pour les hommes de toutes les conditions, ces articles montrent que Notre-Seigneur a pratiqué cette vertu et l'a recommandée avec insistance.

En effet !! Un grand MERCI, mon cher frère Chartreux.
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Re: A. da Silveira sur l'hérésie exprimée par des gestes ou omissions

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A. da Silveira, traduit par le chartreux a écrit :
Des indices qui ne suffisent pas à former un jugement défavorable peuvent cependant suffire à faire douter. Et douter est évidemment un devoir dans ce cas. Le directeur d'une entreprise a clairement une obligation morale envers ses associés de soupçonner un employé s'il observe chez celui-ci un comportement étrange. Un père a le devoir de se méfier de son fils si celui-ci montre des signes d'une crise spirituelle grave, par ce que c'est seulement ainsi qu'il peut remplir son devoir de père.

Il faut dire aussi qu'un jugement favorable peut manquer de base et être par conséquent téméraire, dans la mesure où il peut nuire gravement aux intérêts d'une tierce personne. Un directeur d'entreprise qui accorde une confiance aveugle à un employé, ou bien un père qui, par "gentillesse" excessive, voit son fils meilleur qu'il n'est réellement, ont tous deux fait un jugement téméraire d'acquittement et n'ont pour cette raison pas rempli correctement leur devoir.

Appliquant cela au cas qui nous concerne, nous devons donc dire qu'il n'y a rien de téméraire à soupçonner d'hérésie quelqu'un qui nous en donne l'occasion. Bien au contraire, c'est ne pas soupçonner qui serait téméraire. Ce qui est très-téméraire, en tout cas, c'est d'en faire un principe de ne jamais soupçonner d'hérésie : ce faisant, on facilite manifestement l'invasion du troupeau par les loups en peau de brebis.
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Message par InHocSignoVinces »

chartreux a écrit : mer. 11 mai 2022 8:27
A. da Silveira, traduit par le chartreux a écrit :
Des indices qui ne suffisent pas à former un jugement défavorable peuvent cependant suffire à faire douter. Et douter est évidemment un devoir dans ce cas. Le directeur d'une entreprise a clairement une obligation morale envers ses associés de soupçonner un employé s'il observe chez celui-ci un comportement étrange. Un père a le devoir de se méfier de son fils si celui-ci montre des signes d'une crise spirituelle grave, par ce que c'est seulement ainsi qu'il peut remplir son devoir de père.

Il faut dire aussi qu'un jugement favorable peut manquer de base et être par conséquent téméraire, dans la mesure où il peut nuire gravement aux intérêts d'une tierce personne. Un directeur d'entreprise qui accorde une confiance aveugle à un employé, ou bien un père qui, par "gentillesse" excessive, voit son fils meilleur qu'il n'est réellement, ont tous deux fait un jugement téméraire d'acquittement et n'ont pour cette raison pas rempli correctement leur devoir.

Appliquant cela au cas qui nous concerne, nous devons donc dire qu'il n'y a rien de téméraire à soupçonner d'hérésie quelqu'un qui nous en donne l'occasion. Bien au contraire, c'est ne pas soupçonner qui serait téméraire. Ce qui est très-téméraire, en tout cas, c'est d'en faire un principe de ne jamais soupçonner d'hérésie : ce faisant, on facilite manifestement l'invasion du troupeau par les loups en peau de brebis.

A SUIVRE...


Merci encore, mon bien-aimé frère Chartreux !

Continuez, je vous en prie, continuez jusqu'au bout, pour l'honneur de Dieu et pour sa plus grande gloire, pour que la VÉRITÉ puisse ENFIN triompher et éclairer les pauvres âmes au milieu de cette confusion diabolique extrêmement sournoise.
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Re: A. da Silveira sur l'hérésie exprimée par des gestes ou omissions

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A. da Silveira, traduit par le chartreux a écrit :
5. b. La pertinacité peut-elle être prouvée par des actes ?

Comment démontrer la pertinacité chez quelqu'un qui ne dit jamais rien d'opposé à la foi ? La pertinacité n'implique-t-elle pas une obstination volontaire qui doit nécessairement se traduire par des paroles ? Ici vient aussi une objection semblable à une précédente, qui doute qu'une parole ou qu'un acte puisse exprimer la pertinacité de façon univoque. Comme la gentillesse, le zèle, la haine ou l'orgueil, la pertinacité est un sentiment qui pourrait bien se surajouter superficiellement à l'expression d'un visage ou au caractère d'un acte.

Précisons que le mot de "pertinacité" revêt dans la définition de l'hérésie un sens différent de son usage courant. Suivant le sens usuel du dictionnaire, "pertinace" veut dire très motivé, obstiné, retors, insistant, sur une longue période, persévérant. Tel est également le sens du mot en latin.
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Re: A. da Silveira sur l'hérésie exprimée par des gestes ou omissions

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A. da Silveira, traduit par le chartreux a écrit :
Si c'était la pertinacité en ce sens qui était un ingrédient indispensable du péché d'hérésie, elle n'existerait que dans les cas de malice intrinsèque qui sont peut-être fréquents, mais bien difficiles à prouver ; qui ne pourraient être décidés qu'après une longue période d'observation ; et qui ne pourraient jamais être le résultat d'un moment de faiblesse, de colère par exemple.

Or les moralistes et canonistes sont unanimes à affirmer que le droit canon (can. 1325, 2) n'utilise pas le mot de pertinacité dans ce sens. Comme l'enseigne Tanquerey, "la pertinacité consiste en la négation ou le doute d'une vérité de foi" scienter et volente, c'est-à-dire en sachant parfaitement que la vérité concernée est un dogme, et avec une pleine adhésion de la volonté.
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