chartreux a écrit : ven. 12 sept. 2025 9:21
Après les dernières interventions ci-dessus sur ce fil, tout me semblait résolu concernant cette question. Cependant, dernièrement il m'est venu à l'esprit une objection semblable qui m'a perturbé. La difficulté est la suivante : si l'amour désintéressé de Dieu pour Lui-même est la charité parfaite et la perfection spirituelle la plus haute, comment se fait-il que la formulation de l'acte de charité est affirmative et non impétratoire ? Ne devrait-on pas dire "Je veux vous aimer par-dessus tout", "Donnez-nous de vous aimer par-dessus tout" plutôt que "Je vous aime par-dessus tout" ? C'est pour cela que tantôt, quand je récitais mon acte de charité, il m'a paru un acte de présomption.
Il y a en ceci la différence entre implorer le don ou l’accroissement de la vertu de Charité en nous ou en autrui, ce qui est la prière la plus importante et la plus habituelle qu’il importe de faire, et un acte effectif de Charité, comme celui que nous porte à faire l’Eglise par la récitation d’un tel acte.
La vertu de Charité étant de soi surnaturelle, donc au-dessus des forces humaines, doit donc être infusée par Dieu, lors du Baptême, ou ré-infusée après la perte de l’état de grâce par un péché grave avec l’obtention du pardon divin.
L’âme en état de grâce, d’amitié avec Dieu, est habitée par la Vie Divine de la Très Sainte Trinité y faisant Sa demeure, et c’est plus spécialement l’Esprit-Saint qui nous accorde la Charité, nous y maintient et insuffle la possibilité d’en produire dignement les actes.
De plus, les vertus sont de bonnes habitudes acquises ou infuses, donnant d’accomplir aisément les actes s’y rattachant ; comme, à l’opposé, les vices sont de mauvaises habitudes facilitant l’inclination aux actes mauvais qui y correspondent.
De même que quelqu’un ayant reçu le don d’une bonne santé et d’une capacité physique le rendant particulièrement apte à la pratique de tel sport doit l’entretenir en l’exerçant régulièrement pour demeurer compétitif, ainsi les vertus s’entretiennent et se développent en les pratiquant quotidiennement.
A l’opposé, les vices se combattent en luttant contre la pente à mal agir au moyen de la pratique et multiplication d’actes de la vertu qui leur sont contraires.
C’est en cette optique que l’Eglise nous porte à faire régulièrement des actes vertueux, et notamment à réciter quotidiennement les actes de Foi, d’Espérance et de Charité.
Il importe, certes, de nous appliquer à faire correspondre les élans intérieurs de nos âmes avec les paroles que prononce notre bouche.
Et comme ces vertus surnaturelles dépassent en elles-mêmes nos seules capacités naturelles, il importe d’implorer non moins régulièrement Dieu de nous en accorder la capacité intérieure.
Enfin, il faut remarquer que l’amour de Charité n’est pas une affection sensible, mais un état effectif nous faisant préférer tant en théorie qu’en pratique la Volonté de Dieu à la nôtre et à celle d’autrui.
Le minimum requis pour conserver cet état est le maintien en état de grâce en ne commettant aucune faute grave propre à nous le faire perdre.
Insistons et précisons, par un exemple concret.
Le fait de ne pas ressentir d’affection sensible envers Dieu, ou d’en ressentir une plus grande envers nos parents, amis, proches, n’implique pas que nous n’aimions pas Dieu ou moins que ceux-ci pour autant que nous ne fassions point passer leurs volontés et désirs avant la Volonté de Dieu au travers de Ses Commandements.
C’est cet amour effectif, et non affectif, que Dieu attend de nous :
« Ce n’est pas tous ceux qui Me disent : Seigneur, Seigneur, qui entreront dans le Royaume des Cieux, mais celui qui accomplit la Volonté de Mon Père qui est au Ciel.» (Mt. 7,21).
Or c’est la Charité qui permet d’entrer au Ciel.
De même, ce n’est pas en un ressenti affectif que consiste le véritable amour du prochain, mais à vouloir son véritable bien.
Il importe en outre de préférer Dieu et Sa Divine Volonté à Ses dons.
Vouloir les recevoir pour notre satisfaction à l’encontre de la Divine Volonté comporte en soi un désordre qui peut aller jusqu’à une faute grave.
Ainsi en est-il, par exemple, de faire passer les Sacrements avant la Confession de la Foi.